Keep You Much Longer {Pv Kiana}

Elle marchait. Elle marchait, déambulait entre les racines qui n’attendaient qu’une chose, l’occasion de la faire trébucher, avançait dans la forêt sombre et inquiétante mais qui était aujourd’hui bordée de lumière, ou en tout cas, de quelques rayons de soleil qui parvenaient à percer le dense feuillage des arbres alentours. Où allait-elle ? Bonne question. En réalité, elle avait seulement besoin de s’éloigner un peu du campement, afin de ne pas croiser le fameux Enzo, pour qui elle éprouvait très certainement autre chose que de la simple curiosité et qui était sans cesse entouré de filles, ce qu’elle n’appréciait définitivement pas. Si elle n’avait aucune raison d’être aussi jalouse à son égard, le cœur a des raisons que la raison ignore, pas vrai ? De toutes façons, elle se fichait pas mal du pourquoi du comment, c’était un simple constat, plutôt effrayant, qui nécessitait qu’elle réfléchisse tranquillement à la situation, loin de lui, d’elles, de tout le monde.

Kiana n’allait plus tarder à atteindre les falaises, du haut desquelles la vue était particulièrement magnifique. Ses cheveux lâchés, un air torturé et souffrant, la jeune fille continuait son périple au travers de la forêt, qu’importait si son dos lui faisait mal, ainsi que ses jambes et ses pieds. Elle s’en foutait, l’atmosphère qui régnait là où elle comptait passer ses prochaines heures allait la remettre en pleine forme, à n’en pas douter. Néanmoins elle ne s’était absolument pas attendue à le trouver ici, assis en tailleur sur le sol, à regarder le ciel comme ils le faisaient souvent autrefois. La jeune fille n’eut cependant pas la chance de le surprendre, ce fut même le contraire. Brusquement, il la plaqua au sol, lui coupant le souffle au passage. Elle aurait dû s’y attendre, à force de le connaître mais il l’étonnait toujours autant. Cela la confortait dans l’idée que ce qu’elle éprouvait pour Enzo n’était que passager, ou du moins, elle osait l’espérer, car elle ne supporterait pas de briser ce qu’ils avaient construit. Kilian était sans nul doute l’homme de sa vie, et elle ne le perdrait pour rien au monde. Elle avait été forcée de l’abandonner une fois, elle ne referait plus la même erreur.

« Alors Kiana, qu'est-ce qui t'emmène ici ? C'est dangeureux pour une fille de trainer seule par ici, il pourrait y avoir des bêtes sauvages, ou même pire, des adolescents pervers ! »

Lui lança-t-il, un sourire malicieux illuminant son visage d’ange. Un rire cristallin fendit l’air, celui de Kiana, qui adorait ce genre de moments privilégiés qu’elle pouvait passer avec son aimé. Depuis qu’ils étaient arrivés ici, ils n’avaient pas eu beaucoup de temps à eux et pour cause ; elle avait pris part à une expédition suicidaire dont elle était miraculeusement sortie vivante mais pas indemne. Elle était blessée, physiquement et moralement d’ailleurs. Des bleus et des égratignures couvraient son corps endolori. Et elle avait trahi l’homme de sa vie. La culpabilité la rongeait depuis leur retour à la « civilisation », ou au campement tout du moins. C’est pourquoi elle était plus ou moins mal à l’aise en sa compagnie aujourd’hui, même si elle s’efforçait de ne rien montrer et de conserver un visage serein, en n’oubliant pas que Kilian avait dû mourir d’inquiétude à son sujet lorsqu’il l’avait vue s’engouffrer dans cette grotte qui avait laissé les ténèbres se refermer sur le petit groupe d’étudiants peu après.

« Je t'aime. »

Son cœur s’affola soudainement. Il l’aimait ? Elle fut rassurée de constater que cette déclaration lui fit le même effet qu’autrefois, lorsqu’il le lui avait dit pour la première fois. Rassurée ? Oui, vous n’êtes pas sans savoir que Kiana se posait quelques questions ces derniers temps, notamment en ce qui concernait ses sentiments pour le beau brun. Elle se disait que si Enzo l’attirait autant, c’est que peut-être elle n’était plus aussi amoureuse de Kilian. Cependant elle comprit qu’elle s’était trompée sur toute la ligne, lorsque ce-dernier grogna avant d’enfouir sa tête entre ses bras, geste qui décocha un sourire à la jeune fille. Il était toujours aussi craquant, c’était indéniable, et le son de sa voix la faisait toujours autant rougir, sensation terriblement désagréable dont elle n’avait plus le souvenir. De ses doigts fins, elle releva la tête du garçon et déposa ses douces lèvres contre les siennes. Ils avaient eu besoin de se retrouver au milieu de toutes ces légendes, ces catastrophes, ces angoisses. Il l’apaisait d’un sourire, comme au bon vieux temps. C’était là sa façon de lui souffler un « Moi aussi. », car c’était bel et bien vrai. Elle l’aimait, plus que tout au monde, plus que sa propre existence, qui n’avait plus de sens sans lui.

« Je t'aime aussi. »