« allons nous gaver d\'amour jusqu\'à en crever. » encours

Elle écrivait frénétiquement, barrait, récrivait puis rebarrait à nouveau. Appuyant parfois trop fort avec le bout de son crayon, inscrivant des lettres éternelles de son écriture bancale et trop petite. De petites boulettes de papier jonchaient déjà le parquet poussiéreux du studio et elle n'arrêtait pas, cherchant en vain un nom pour le petit être présent en son sein.
Anastasia Diamante Sandoval était une jeune femme d'une vingtaine d'années. Jolie blondinette à la longue silhouette longiligne, elle faisait partie de ces grandes femmes aux courbes délicates et fragiles. Mais bien qu'elle fut fragile de corps, son caractère ainsi que son tempérament était quand a eux, aussi solides que le roc et aussi brûlants que le feu. Indomptable et insoumise, personne ne pouvait faire pression sur elle, lui faire courber l'échine ou bien lui imposer un point de vue, une idée ou encore un choix qui n'allait pas dans son sens. C'était une véritable tête de mule qui n'en faisait qu'à sa tête, n'écoutant que son coeur. D'ailleurs, en ce mariant lors de son vint-et-unième anniversaire, avec le fils unique de la grande Famille des Hernandez: Vincenzo Joao, c'était encore son coeur qui lui dictait ce qu'elle devait faire, brûlant d'un amour sincère pour ce beau jeune homme ténébreux. Planant sur un petit nuage dorée ou tout lui semblait lui sourire, la chute fut pourtant rude lorsqu'elle apprit que son mari ne voulait pas d'un enfant pour le moment.

_ Ah! Tu mi dici cosa ne pensi?
(ah tu me dis ce que tu en pense)
_ Hum se davvero...
(hum s'il le faut)
_ Ok! Cosa ne pensi di Angelo? E 'italiano. E 'italiano.
(ok que pense tu de angelo ? c'est italien. on est Italien)

Elle n'eu en guise de réponse qu'un vague grognement qui voulait tout dire. Vincenzo, assis dans la poussière, adossé à un mur ne portait guère d'importance aux dires de sa chère et tendre. C'était clair, net et précis. Lui ne voulait pas de cet enfant et cela ne changerait pas. A l'âge qu'ils avaient il trouvait que c'était trop tôt et de plus il n'était même pas certain de rester encore longtemps avec son épouse. En effet, la semaine dernière quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il vit Anastasia en compagnie d'une autre personne dans le lit conjugal. Lui qui se pensait à l'abri d'un adultère avec ça bien aimée était tombé de haut. Il n'était pas certains que le polichinelle soit de lui alors pourquoi être enthousiaste ? Un bébé c'est contraignant. Il avait tenté de persuader Anastasia d'avorter mais elle avait refusé et avant que ça ne termine dans un bain de sang il avait cédé en se jurant de ne pas considérer l'enfant comme étant sa progéniture.

_ Molto buono. Noah ?
(très bien, noah ?)
_ E 'troppo british per me.
(c'est trop british pour moi)
_ Mi piace così Noah avrà il suo nome, mi permette di scegliere un altro.
(il me plait donc se sera noah son premier prénom, je te laisse choisir l'autre)
_ Come ti piace, non mi interessa, ma se si vuole in ultima analisi, è quello che ho chiamato allora partecipa Zane è meno british o meno.
(comme tu veut, ça m'est égal finalement mais si tu tiens a ce que je participe appele le donc zane, c'est moins british au moins)
_ Perfetto! dit t-elle en caressant son ventre rond.
(parfait)
_ Perfetto yeah.
_ Noah Zane Hernandez. Piccolo Principe.

Secrètement elle espérait que son fils serait semblable à Vincenzo, car il était beau, certainement plus qu'elle bien qu'elle ne se trouva pas spécialement laide. Elle souhaitait que Noah est les mêmes boucles brunes recouvrant son front, les mêmes grands yeux bleu azuré et remplit de charme, le même petit accent italien si particulier et le même nez que lui également.
Froissant son écrit Anastasia le glissa dans la poche arrière de son jean et sourit, plus heureuse que jamais. L'arrivée de cet enfant serait une bénédiction, elle en était certaine. Elle avait hâte, hâte de montrer à tout le monde comme il était beau, hâte de le voir, hâte de courir avec lui en riant aux éclats. Oh oui, la jeune femme avait hâte de vivre avec lui.
Vincenzo lui, était indécis. Et s'il s'avérait finalement que cet enfant soit le sien ? Et s'il était comme lui ? Et s'il tombait sous le charme de la bouille rondouillarde qu'il aurait à sa naissance ? Il serait probablement très heureux. Avoir un enfant n'était peut t'être pas si terrible après tout. Il lui faudrait un temps pour s'habituer, comme tous les nouveaux père, mais au fond il était quasi certain qu'il aller aimé ce gosse. Il serait ravi de lui apprendre l'Italien, encore plus de l'amener jouer au football dans le parc, ravi de lui apprendre a construire une épée en bois. Il serait heureux peut t'être lui aussi. Il en oublierait même le dérapage de sa copine.
Piccolo Principe. Ces mots dans la bouche de sa femme le firent fondre. Un sourire fendit son visage malgré lui et une lueur d'excitation pétilla dans ses prunelles bleutées. Elle en fut heureuse, cela signifiait qu'il devenait moins réticent, un grand pas en avant déjà.

***

Mots d'Adieux ;
« Maman .. Belle maman .. Tant de choses à te dire, peux de temps pour laisser les mots sortir. Papa me surveille, de près, il ne m’aime pas je le sais. Je vois la haine qu’il me porte s’intensifier un peu plus au fil des jours, je vois ce regard noir qu’il lance vers moi, cette envie de me voir partir qu’il a depuis toujours. S’il m’a élevé, c’est pour toi. Aujourd’hui, il ne veut plus de moi. Aujourd’hui il dit que je suis assez grand, que je peux me débrouiller, il désire que je m’en aille. Maman, je prie pour que ce jour arrive au plus vite. Je veut partir mais aussi rester pour m’assurer qu’il prend soin de lui car tu sais maman, je l’aime moi .. J’aime ce père qui m’a élevé malgré tout, je l’aime car il t’aimait de tout son cœur. Si lui ne m’aime pas, je l’aime assez pour deux crois-moi. Maman .. Es-tu fière de moi ? Me regarde tu parfois ? Je suis désolé si tu savais .. Désolé de t’avoir infligé ça. Pourquoi maman ? Pourquoi as-tu choisi ce jour-là ? Pourquoi n’as-tu pas laissé la vie me quitter ? Tout le monde aurait été si heureux .. Tu aurais eu une fille, cette sœur que je n’ai jamais connu, tu aurais eu un mari, ce père qui ne peut plus me regarder, et moi je vous aurais regarder d’en haut en souriant. Tu sais, si depuis tout ce temps j’ai toujours réussi à me relever, c’est parce que je savais que tu me regardais...
Tu me manque. Je t’aime maman, ne l’oublie pas, jamais. »
Noah Zane Sandoval-Hernandez, six ans et demi (1993).

Sur un petit morceau de papier froissé le jeune garçon avait écrit ces quelques mots à l'encontre de sa mère. Décédée il y a six ans en lui donnant vie. Il venait tous les Dimanches sur sa tombe lui déposait un petit mots, priant pour que de là-haut elle le voit, elle le lise. Jamais il ne l'avait connu mais à travers leurs albums photos il avait apprit pourtant, il arrivait même à savoir ce qu'elle aimait, ce qu'elle n'aimait pas aussi. Il savait tout d'elle, comme-ci c'était elle en personne qui lui disait tout. Petit garçon mais déjà grand, il n'avait jamais pleuré en venant sur sa tombe, son père lui disait que c'était être faible, or lui ne l'était pas. Pas comme son père qui noyait chaque jour sa peine dans l'alcool, qui le frappait pour se défouler, qui l'enfermait dans le cagibi pendant qu'il s'affairait avec de gentes demoiselles, venues soit disant par hasard à la maison. Il le croyait, il ne savait rien du monde extérieur. Il ne sortait jamais ou presque jamais, ces seules sorties étaient au cimetière et parfois lorsque cela lui était permit il s'asseyait sur le perron et passait sa journée là, comptant les voitures. La nuit il ne dormait pas, du moins pas avant une heure avancée de la nuit. Noah n'y arrivait tout simplement pas, il faisait trop de cauchemars pour y parvenir.
Ce jour-là comme tous les autres jours il était venu seul, une rose à la main et habillé à peu près convenablement. Il glissa le mot sous une pierre, le coeur lourd. Son regard s'attarda sur la tombe. Une grande pierre tombale où était gravés les mots: ANASTASIA DIAMENTE SANDOVAL; 1966 - 1987. Le garçon fit glisser son doigt sur chaque lettres, doucement. De son autre main il s'appuya maladroitement sur le sol terreux puis se redressa, posant la fleur sur la pierre.

_ Addio madre, io ti amo.